Dalila Meftahi est une grande actrice et une personnalité qui, par son talent, sa polyvalence et sa crédibilité inébranlable, marque la scène culturelle tunisienne depuis des décennies. Sur les planches ou devant la caméra, elle a conquis le cœur de millions de spectateurs par ses rôles réalistes touchants, intenses et mémorables qui témoignent de sa capacité à repousser les limites de l’interprétation. Elle a participé récemment au Festival du théâtre arabe à Mascate avec sa pièce «Portail 52» qui rend hommage aux femmes tunisiennes résistantes face à la colonisation. Entretien exclusif avec une artiste passionnée et engagée.
A quand remonte votre carrière d’actrice ?
J’ai fait mes débuts artistiques au théâtre. J’ai commencé très jeune, à sept ans.
C’était quand j’étais encore à l’école primaire à l’avenue Habib-Bourguiba de Jendouba.
Après un parcours aussi riche et beaucoup de succès, comment évaluez-vous la scène tunisienne actuelle ? Qu’est-ce qui va vers le pire et qu’est-ce qui est mieux qu’avant ?
On ne peut pas dire que les choses vont vers le pire. Les temps changent et chaque époque a ses critères pour la production artistique. Les préoccupations et la notion même de valeurs artistiques fondamentales ne sont pas identiques à toutes les époques. Mais je peux vous assurer que le paysage culturel en Tunisie prend de la maturité. La notion de politique culturelle bien définie est primordiale. En Tunisie, c’est particulièrement le théâtre qui connaît une certaine prospérité et nous avons une longueur d’avance par rapport à beaucoup d’autres pays arabes.
Y a-t-il un rôle que vous avez particulièrement aimé jouer et qui est spécial à vos yeux ?
Tous les personnages que j’ai incarnés se valent pour moi, ou presque. Une chose est sûre, je n’accepte pas un rôle qui ne me plaît pas et dans lequel je ne me vois pas immerger.
Vous avez interprété avec justesse dans beaucoup de vos œuvres le personnage de la femme écrasée, figée dans la misère et la fatalité et souvent en proie à un destin tragique. Est-ce votre choix de privilégier ce genre de personnages.sont-ce sont plutôt les réalisateurs qui vous y voient ?
J’ai incarné la femme issue d’un milieu populaire mais je n’en fais pas ma spécialité. D’ailleurs, j’ai joué des catégories sociales différentes. Ce n’est en aucun cas un critère de sélection pour moi.
Quand je reçois un scénario, si c’est bien écrit et que j’aime le rôle, je prends. Je peux dire que je n’accepte que les rôles qui savent me convaincre.
Quels sont donc vos critères de sélection ?
Un rôle qui a de l’impact, qui a son poids dans l’œuvre et auquel je pourrai ajouter ma touche et apporter une véritable valeur ajoutée.
Certains de vos feuilletons comme « Ikhwa wa zaman » et «Sayd Errim» ont été rediffusés maintes fois et le public les revoit toujours avec beaucoup d’enthousiasme. Qu’est-ce qui explique à votre avis cet attachement aux anciennes productions télévisuelles?
Je dirais tout simplement que ce sont des personnages qui nous ressemblent, qui sont à l’image de notre société et de notre entourage. C’est ce qui fait qu’on continue à les aimer et à les regarder même des décennies après la première diffusion.
Vous avez été réalisatrice au théâtre. Est-ce qu’on peut vous voir bientôt dans la réalisation cinématographique ou pour les séries télévisées ?
Je pense que c’est encore un peu tôt pour entamer des expériences de réalisation en dehors du théâtre. Mais, à ce stade, je me vois bien en assistante de direction si une bonne occasion de collaboration se présente.
Quand vous n’êtes pas en tournage ou en répétition, quelles sont vos activités préférées ?
Je suis passionnée par toutes les activités qui sont en rapport avec mon métier. En dehors de ça, je m’intéresse beaucoup à la musique et aux arts plastiques. En fait, toute ma vie tourne autour de l’art, vous voyez !
Dalila Meftahi
est une grande actrice qui a su s’imposer dès son jeune âge sur les planches comme dans le paysage du cinéma et de la télévision. Grâce à son talent, sa polyvalence et son charisme, elle a incarné des rôles variés, passant de la comédie au drame avec une aisance impressionnante. Son interprétation est toujours marquante par sa crédibilité inébranlable. Elle continue depuis des décennies à conquérir le cœur de millions de téléspectateurs par ses rôles réalistes, touchants, intenses et inoubliables. Les Tunisiens gardent encore en mémoire « Latifa » dans « Layem kif errih ».
Ce célèbre feuilleton réalisé par Slaheddine Essid date de 1992 mais attire encore une large audience sur Youtube. Dalila Meftahi a partagé l’affiche avec deux grands acteurs disparus, Fethi Haddaoui et Mustafa Adouani. Dans « El douar », diffusé la même année, c’est dans la peau de « Monia » qu’elle donne la réplique à Houcine Mahnouch, alias El Ati. D’autres rôles bien fameux se sont enchaînés durant des années. On peut en citer « Al Assifa », en 1993, puis « Al Hassad », en 1995, réalisés par Abdelkader Jerbi ou encore « Wa yabkaa al hob » de Mohamed Al Ghadban diffusé en 1999. Elle a également joué dans « Manamet Aroussia » en 2000 avec le grand réalisateur Slaheddine Essid.
Dalila Meftahi a collaboré avec le metteur en scène Habib Msalmini dans des chefs- d’œuvre qui marqueront à jamais l’histoire des productions tunisiennes : « Anbar Al layl » en 1999, « Hisabat wa Ikabat » en 2004 et « Bin Ethneya » en 2008. On la retrouve aussi dans « Kamanjet Sallema » de Hammadi Arafa produit en 2007. Tous ces feuilletons ont été rediffusés à plusieurs reprises sur la chaîne nationale Watania 2. Les téléspectateurs les revoient à chaque fois avec le même enthousiasme sans jamais se lasser, même s’ils connaissent par cœur l’intrigue et le dénouement.
Dalila Meftahi a été sollicitée pour d’autres séries dramatiques bien célèbres. Elle a participé au fameux « Maktoub » en 2008 avec le metteur en scène et producteur Sami Fehri. La même année, c’est « Sayd errim » réalisé par Ali Mansour qui a fait fureur par son thème et par son casting ingénieux.
Dalila Meftahi y incarne « Mongia », une mère résiliente, traînant sous le poids de la pauvreté et du déshonneur. Dans les années suivantes, on l’a retrouvée dans « Donia», en 2010, le réalisateur Naïm Ben Rhouma, « Njoum Ellil », « Li ajl Ouyoun Catherine » en 2012 avec Hamadi Arafa ou encore « Layem » de Khaled Barsaoui diffusé en 2013. Parmi les feuilletons les plus récents, on peut citer « Naourat Al-Hawa », « Awled Moufida 3 », « Chouerreb »..
Au cours de sa riche carrière, Dalila Meftahi a également été saluée pour la profondeur de ses personnages sur grand écran et sa capacité à interpréter des rôles complexes. Entre la tante « Hajer » dans « Un divan à Tunis » et la mère endeuillée dans « L’albatros », beaucoup de nuances se dressent.
Devant la caméra ou sur scène, elle témoigne en continu de sa capacité à repousser les limites de l’interprétation. Par sa personnalité et son jeu d’actrice captivant, c’est une figure bien établie dans le théâtre tunisien, ayant cumulé de nombreuses récompenses dans des festivals étrangers. Parmi les pièces les plus célèbres où elle a joué, on peut citer « Redeyef 54 » d’Ali Labidi, « Vivre au paradis » de Bourlem Guerdjou, « Khorma » de Jilani Saadi, « Le Chant des mariées » de Karin Albou et « Fin décembre » de Moez Kamoun. Elle est également réalisatrice au théâtre. Parmi ses plus grands succès, la pièce « Shahrazade Lalat Ensa », une production tuniso-algérienne, « El hachachine » qui date de 2023 et, plus récemment, « Portail 52 » qui rend hommage aux femmes tunisiennes résistantes face à la colonisation.
Jouissant d’une énorme popularité, Dalila Meftahi suscite beaucoup d’admiration et de respect à travers ses passages télévisés ou à la radio. Elle garde toujours une certaine discrétion sur sa vie personnelle, préférant se concentrer sur sa carrière et ses engagements artistiques.
Entretien exclusif avec une artiste passionnée et engagée.