Un hommage à l’artiste Aly Abid aura lieu à l’occasion de la 39e édition de la Foire internationale du livre de Tunis à travers l’exposition d’un échantillon de ses œuvres réalisées tout au long de sa carrière. Cet hommage vient saluer une expérience unique et exceptionnelle, qui a transformé la caricature en une force créatrice, faisant de cet art un véritable espace d’expression. Aly Abid a ouvert à la caricature de nouveaux horizons, marqués par un engagement profond en faveur des grandes causes de la société et de l’humanité, au premier rang desquelles la cause palestinienne.
Il n’est rien de plus difficile, pour une personne, que de s’aventurer à écrire sur une expérience qu’elle n’a pas vécue ou de rassembler le parcours d’un individu à travers des traces lues ou entendues.
Il n’est pas facile d’évoquer une carrière comme celle du caricaturiste Aly Abid, qui a su maîtriser l’art de condenser les mots par le dessin, devenant l’un des fondateurs les plus importants et les plus célèbres de cet art en Tunisie. Ses dessins se distinguent par la précision de l’image et de la représentation, la profondeur de l’idée et de la réflexion, tant sur le plan de la construction que des thèmes, des symboles et des significations. Cela l’a placé à l’avant-garde des praticiens de cette forme d’expression, au cœur du mouvement de développement créatif, mêlant beauté et authenticité. Il fut « le pionnier de l’art de la caricature » en Tunisie.
Si l’Italie a Léonard de Vinci (1452-1519), la France, Honoré Victorin Daumier (1808-1879) et André Gill (1840-1885), l’Amérique, Jimmy Murphy (1891-1965), l’Égypte, George Bahgoury (1932-) et Mustafa Hussein (1935-2014), la Palestine, Naji al-Ali (1937-1987), et d’autres encore, la Tunisie a Aly Abid, dont les dessins ont documenté les mouvements de la société, les événements et les figures marquantes en Tunisie et dans le monde.
Le devoir de rendre hommage à l’artiste et journaliste Aly Abid nous pousse à réécrire sa biographie, non pas telle qu’il la voudrait lui-même, mais telle que nous sommes capables de la présenter, tant il est difficile d’avoir les détails de la vie de la personne honorée et de son parcours, tantôt dense, tantôt vaste, selon l’intensité de sa créativité et l’ampleur de son rayonnement.
Son parcours s’inscrit entre ceux qui l’ont précédé, comme Hatem Mekki (1918-2003), Hédi Turki (1922-2019) ou Zoubeir Turki (1924-2009), et ceux qui sont venus après.
Notre effort, dans ce court texte, se limite donc à mettre en lumière certains aspects de ses œuvres peut-être familiers pour ceux qui ont connu l’artiste mais dont l’évocation, même brève, demeure importante pour d’autres : notamment ceux dont la relation avec lui fut passagère, ou ceux qui ne l’ont pas connu en raison de leur jeune âge, et auxquels beaucoup de son expérience et de ses réalisations ont échappé.
De son histoire si riche, nous nous contenterons de quelques détails.
Aly Abid est né à Tunis en 1938, dans le quartier populaire de Bab El-Akoues, situé entre Bab Saadoun, Halfaouine et à proximité de Bab Souika. Il a étudié au kouttab (école coranique), où il a mémorisé le Coran, puis a poursuivi son enseignement primaire au collège Sadiki et son secondaire au lycée Khaznadar.
Dès son jeune âge, il était passionné par le cinéma et le théâtre, et excellait dans l’art de dessiner ses camarades de classe ainsi que ses voisins.
Il utilisait les murs de la maison, les plaques de marbre, les carreaux de céramique, ses cahiers et ses livres comme supports pour exprimer son talent et sa passion pour le dessin.
Le jeune garçon nourrissait le désir de rejoindre l’Institut Supérieur des Beaux-Arts de Tunis, situé à quelques dizaines de mètres seulement de la maison familiale. Toutefois, ce rêve ne se réalisa pas, car il décida d’abandonner ses études et choisit d’entrer dans le monde professionnel.
La carrière du caricaturiste Aly Abid a débuté en 1957 dans le journal El-Ifrit (Le Diable), puis il a travaillé pour le journal Kol Chay Bil Makchouf. Il a été engagé comme dessinateur permanent au journal Al-Amal (Le Travailleur) en 1967, a ensuite collaboré au magazine Dialogue de 1976 à 1988, puis au journal Al-Horria (La Liberté) jusqu’à l’arrêt de sa parution. Il a également participé aux journaux Biladi (Mon pays) et L’Action.
Aly Abid a participé à de nombreuses expositions en Tunisie, dans les pays arabes et à l’échelle internationale, notamment une exposition personnelle en 1972 à la Salle des Nouvelles à Tunis, une autre à la Cité internationale des arts à Paris en 1974, puis une nouvelle exposition à la Salle des Nouvelles en 1976. Il a également pris part au Festival arabe de Damas lors des éditions de 1979 et 1981, où il a remporté le premier prix grâce à trois caricatures consacrées à la question du Moyen-Orient.