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Marre de l’entendre se plaindre ? Nos stratégies de coaching pour vous libérer de ce profil toxique qui draine votre énergie.

Il y a des personnes qui semblent attirer la grisaille. A peine entrées dans une pièce, elles colorent l’air d’un soupir. Leur refrain est connu : « C’est trop injuste ! ». Tout est contre elles, rien ne fonctionne, personne ne les comprend. Ce n’est pas de la méchanceté. C’est un mode de survie. Mais à long terme, c’est un piège : pour elles comme pour ceux qui les entourent. On les appelle parfois les « Victimes Chroniques », d’autres les surnomment « Calimero ». Derrière l’image attendrissante du petit poussin noir se cache un mécanisme psychologique redoutable : la dépendance à la plainte.

La mécanique d’une plainte sans fin

Le syndrome de Calimero est d’abord une croyance. Celle que le monde est hostile et que, quoi qu’on fasse, rien ne changera. C’est ce que les psychologues appellent un locus de contrôle externe : la conviction que la vie se décide ailleurs, sans nous. Cette pensée, répétée depuis des années, devient une habitude cognitive ; elle s’installe comme un réflexe. Chaque difficulté devient une confirmation du malheur, chaque déception une preuve que « la vie est injuste ».

Mais derrière cette posture, il y a souvent une blessure. Un sentiment d’abandon ancien, un manque de reconnaissance, une enfance où l’amour était conditionné à la souffrance. La plainte devient alors un langage : crier sa détresse pour exister. Comme l’explique la coach en résilience émotionnelle, Marie Lemoine, «certains ont appris que la douleur attire l’attention mieux que la joie ». Le problème, c’est qu’à force de parler de malheur, on s’y enferme. Et on enferme aussi les autres.

La fatigue invisible de l’entourage

Etre proche d’un Calimero, c’est souvent marcher sur une ligne de crête : vouloir aider sans s’y noyer. Au début, on écoute, on compatit. Puis la répétition use. Les mêmes récits reviennent, inchangés. Les mêmes obstacles sont détaillés, sans jamais être franchis. Et lorsque l’on propose une solution, elle est immédiatement rejetée : «Oui, mais ça ne marchera pas…».

C’est le piège du triangle dramatique décrit par le psychologue Stephen Karpman : la victime appelle un sauveur, le sauveur finit frustré, puis devient persécuteur. La relation se referme comme une boucle. Le coach comportemental Yannis Boulan souligne : «Plus vous essayez de sauver la victime, plus vous l’aidez à rester victime ». Car dans ce théâtre émotionnel, le sauveur nourrit le scénario. Tant qu’il joue, la pièce continue.

Le confort paradoxal de la souffrance

Si la plainte persiste, c’est qu’elle rapporte quelque chose. En psychologie, on parle de gain secondaire : obtenir de l’attention, échapper à la responsabilité, se sentir existant. Mieux vaut être malheureux que transparent. La victime chronique ne cherche pas une issue, elle cherche un témoin. Le problème, c’est qu’à long terme, cette posture épuise tout le monde, elle vide les relations de leur énergie.

Ce confort paradoxal repose sur une idée trompeuse : tant que je souffre, je ne suis pas responsable. « Etre victime, c’est parfois une façon d’éviter la peur d’agir », rappelle la psychothérapeute française Claire Arnaud. Prendre sa vie en main, c’est risquer l’échec, mais aussi la liberté. Or, la liberté fait peur à ceux qui ont appris que dépendre était plus sûr que choisir.

Sortir du rôle : le basculement intérieur

Changer ce schéma demande un renversement intérieur. La première étape consiste à reconnaître la mécanique. Il ne s’agit pas de se juger, mais de prendre conscience du discours intérieur : « Je n’y peux rien », « C’est toujours pareil», « Personne ne m’aide ». Ces phrases, répétées jour après jour, deviennent des prisons mentales.

Le coaching cognitif propose une alternative : remplacer «Pourquoi moi ? » par « Que vais-je faire ? ». Ce simple changement de formulation déplace le centre de gravité. Il réintroduit l’action là où régnait la passivité. Les neurosciences confirment que le cerveau se reconfigure selon les pensées qu’on lui sert : plus on alimente le registre de l’impuissance, plus on renforce les circuits neuronaux du découragement.

A l’inverse, chaque petit geste de reprise de contrôle — une décision, un appel, une action minime — réactive le sentiment de pouvoir agir.

Le coach et psychiatre Martin Lemoine résume : «La clé, ce n’est pas de se sentir bien avant d’agir, c’est d’agir pour se sentir mieux».

Pour l’entourage : refuser le rôle de sauveur

Si vous vivez avec une personne en mode victime, la solution n’est pas de l’abandonner ni de la corriger, mais de refuser d’entrer dans le jeu. Cela commence par un cadre clair : limiter le temps d’écoute, poser une distance saine. «J’ai dix minutes à t’accorder, que veux-tu en faire ? » C’est une phrase simple, mais d’une efficacité redoutable : elle replace la personne dans sa responsabilité.

Autre règle d’or : validez l’émotion, pas la plainte. Vous pouvez dire «Je comprends que tu sois frustré » sans approuver le discours du malheur. Cela permet de reconnaître la souffrance sans la nourrir. Et surtout, résistez à l’envie d’apporter la solution. A la place, demandez : «Et toi, que peux-tu faire maintenant ? ». Cette question, posée avec calme, est un miroir psychologique : elle invite l’autre à redevenir acteur.

Enfin, si la plainte s’intensifie, si la culpabilité devient une arme, restez factuel. «J’ai fait ce que je pouvais», puis stoppez l’échange. Mettre fin à la discussion n’est pas un abandon, c’est une protection. Dans le langage du coaching, on appelle cela une écologie émotionnelle : préserver son énergie, respecter ses limites, rester aligné.

Le piège de la culpabilité

Le Calimero toxique sait très bien manier la culpabilité. Si vous vous éloignez, il vous reprochera votre froideur. Si vous restez, il vous reprochera de ne pas en faire assez. L’enjeu, ici, est d’assumer que votre bien-être n’est pas négociable. Vous ne pouvez pas être la solution d’un problème que l’autre refuse de résoudre.

Les psychologues parlent de désengagement empathique conscient : une forme de détachement bienveillant qui consiste à garder le cœur ouvert, mais l’énergie protégée. Vous pouvez avoir de la compassion sans devenir une éponge émotionnelle. Le plus grand service que vous puissiez rendre à une victime chronique, c’est de lui renvoyer son pouvoir, pas de le lui confisquer par pitié.

Le miroir plutôt que l’éponge

Le message essentiel du coaching moderne est clair : il ne faut plus être l’éponge, mais le miroir. L’éponge absorbe, se gorge, se vide. Le miroir reflète. Il ne prend rien, il montre. C’est exactement ce que doit faire l’entourage : refléter la responsabilité sans s’en charger. Lorsque vous cessez d’alimenter le discours de la plainte, l’autre n’a plus de carburant. Parfois, il s’éloigne ; parfois, il se transforme. Dans les deux cas, vous gagnez en sérénité.

«Ce n’est pas en réparant quelqu’un que vous l’aidez, c’est en lui montrant qu’il peut se réparer», rappelle le coach québécois André Morel. Cette philosophie est le cœur même du coaching existentiel : chacun a le pouvoir d’écrire la suite de son histoire. Mais tant qu’il trouve un public, le Calimero ne changera pas. Le silence ferme la scène, et la pièce se termine.

Le risque d’un monde saturé de victimes

Dans nos sociétés où la souffrance s’exprime sans filtre sur les réseaux, le rôle de victime est devenu valorisant. Se plaindre, c’est aussi exister, trouver une place, une audience. La société récompense la fragilité exposée. Mais à force de glorifier la plainte, on dévalorise la résilience. On oublie que la guérison demande un effort, une décision, un acte.

Le danger collectif, c’est cette contagion de la victimisation: plus personne ne se sent acteur.

Tout le monde se dit blessé, donc tout le monde attend réparation. Or, la psychologie positive rappelle que le pouvoir personnel naît de la responsabilité, pas du ressentiment. «Nous ne sommes pas responsables de tout ce qui nous arrive, mais nous sommes responsables de ce que nous faisons », écrivait Viktor Frankl. C’est cette nuance qui sépare la souffrance de la sagesse.

Choisir la responsabilité, pas la plainte

Le syndrome de Calimero n’est pas une fatalité. C’est un rôle, et tout rôle peut être quitté. Si vous vous reconnaissez dans la plainte, commencez petit. Si vous vivez près d’un Calimero, cessez d’en être le sauveur : écoutez, posez vos limites et laissez le silence faire son œuvre. La vraie liberté émotionnelle commence quand on cesse de dire «C’est trop injuste! » pour enfin penser «C’est à moi de voir ce que j’en fais».

Mais le Calimero n’est que la première figure de ce théâtre relationnel qui vide nos batteries. Certains ne se plaignent pas : ils séduisent, captivent, envoûtent et prennent le contrôle par le charme. La semaine prochaine, notre série Psycho 360° vous plongera dans l’univers du Gourou, ce leader émotionnel qui ne domine pas par la force, mais par l’influence subtile.

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