Aicha Ben Ahmed a rapidement conquis le cœur du public, dès ses débuts, grâce à son charisme naturel et son jeu sincère. Portée par une ambition inébranlable, elle part s’installer en Égypte où elle se forge une carrière brillante, enchaînant les rôles marquants aux côtés des plus grandes figures du milieu. Elle a donné la réplique à Ahmed Mekky dans « El Ghawi», Mohamed Ramadan dans «Nisr Al Sa’eed», Khaled Al Nabawy dans «Nazwa», Tamer Hosny dans «The Money» et bien d’autres. Dans cette interview, elle nous livre le récit d’un parcours construit avec passion et ténacité.
À quel moment de votre vie avez-vous pris la décision de vous consacrer à une carrière d’actrice ?
J’ai fait des études universitaires en arts graphiques et publicité puis des stages dans des boîtes de communication. J’étais donc loin du métier d’actrice. C’est le réalisateur Nouri Bouzid qui m’a contactée pour me proposer un rôle dans un de ses films. Le projet de collaboration a été abandonné en cours de route. Mais ça a réveillé en moi un amour pour ce domaine et j’ai alors enchaîné les castings pour décrocher un tout premier rôle.
Vous avez campé des personnages très divers. De tous ces rôles, lesquels ont particulièrement marqué votre carrière ou même votre personnalité ?
Je pense surtout aux films «Jeudi après-midi» avec Mohamed Damak, en Tunisie, et «Narcisse» (Aziz Rouhou) de Sonia Chemkhi. Il y a aussi le feuilleton «Li Ajli Ouyoun Catherine» réalisé par Hamadi Arafa, qui me tient vraiment à cœur.
En Egypte, je citerais «Nisr Al Sa’eed», «Leabat Newton», «Al nazwa».. Ce sont des rôles qui ont une place spéciale dans mon cœur et qui restent gravés en moi.
Vous avez une carrière variée entre le cinéma, la télé et le théâtre. Où vous sentez-vous le plus à l’aise ?
Le cinéma est l’univers qui me parle le plus parce que c’est là où j’ai fait mes débuts. Je pense notamment au film syrien «Mon dernier ami» puis à ma première expérience en Tunisie avec Mohamed Damak. Après vient le théâtre même si mes expériences sont limitées. Mais, chaque fois que je suis montée sur les planches, c’était magique. Ça me ferait trop plaisir de renouer avec le théâtre en Egypte ou en Tunisie. Ce bonheur d’être sur scène, le contact direct avec le public, recueillir des réactions instantanées, le trac, le stress, cette euphorie qui s’étale des journées après le spectacle.. Rien ne peut égaler ces sensations. Quant aux feuilletons, ils offrent plus de visibilité et de proximité avec le public, donc un plus facile accès à la célébrité. Il y a aussi plus de confort matériel comme on gagne notre vie à travers nos rôles sur le petit écran plus que par les films. Le cinéma a, comme grand avantage, la durabilité comme les œuvres vivent plus longtemps que leurs créateurs. C’est aussi tout un plaisir lors des tournages. En résumé, si j’avais à les classer, je dirais le cinéma, le théâtre puis les feuilletons.
Avez-vous des modèles ou des idoles dans votre métier ?
Oui. Fatma Ben Saidane, Amal Hedhili, Juliette Binoche, Isabelle Huppert, Marion Cotillard…
La liste est longue mais ce sont les stars que je regarde souvent et auxquelles je me réfère. Elles m’inspirent par leur jeu devant la caméra et leurs interviews. Quand je regarde leurs succès, ça me booste et me donne de l’énergie pour continuer.
À voir comment elles raisonnent, comment elles voient la vie, leur approche, l’angle sous lequel elles abordent ce métier, elles sont toutes différentes mais chacune a un côté qui me donne du plus aussi infime soit-il.
Tout ce que j’apprends d’elles est enrichissant tant sur le volet professionnel qu’humain. Ce sont aussi des exemples à suivre quant à leur engagement aussi parce que c’est très important pour un artiste d’être engagé.
Vous avez conquis un large public à l’échelle arabe alors que la concurrence est forte dans votre domaine. Quels ont été les défis majeurs, les principales difficultés à affronter ?
Les phases difficiles, surtout en Egypte, sont plus en rapport avec les succès qu’aux périodes où je ne travaillais pas. Les débuts ne sont pas faciles évidemment : chercher des rôles, les projets avortés, les critiques du public et des professionnels.. Tout ça ne m’inquiète pas beaucoup. Je reste optimiste et je sais que l’avenir sera toujours meilleur.
Mais, par contre, le grand succès me fait peur. Je l’appréhende parce que je serai sous les feux des projecteurs, avec toute l’attention braquée sur moi, à tous les niveaux. Briller attire aussi les regards mal intentionnés: des ennuis, des coups bas, on commence à me chercher la moindre gaffe pour en faire une catastrophe….
Plus on réussit, moins on a le droit à l’erreur. Par contre, quand je ne travaille pas ou quand je fais un projet non abouti ou qui n’a pas marché, c’est une période de calme et de quiétude.
J’en profite pour savourer plus de la liberté par rapport à ce que je fais et ce que je dis.
Les hauts et les bas font partie intégrante de la vie, on n’est pas toujours au sommet et au meilleur de sa forme. Réussir sa carrière demande de surmonter de nombreux obstacles.Le chemin n’a jamais été fluide pour moi et j’aimais pourtant bien les périodes de persévérance. On ne devient pas célèbre par un coup de baguette magique. Il faut de l’endurance.
Vous êtes classée parmi les plus belles actrices à l’échelle arabe. Dans quelle mesure pensez-vous que votre physique a contribué à votre succès ?
La beauté aide un peu au début pour se faire remarquer. Un petit coup de boost, mais qui n’est qu’un détail. Le physique est éphémère, ce qui compte le plus c’est le travail acharné et la rigueur, Le tout, ça fait un bon mix. Sinon, si on mise sur le physique, le public va se lasser rapidement et se détourner pour chercher des profils plus intéressants.
Est-ce que vous n’envisagez pas de participer à des œuvres tunisiennes comme d’autres actrices vivant en Egypte et qui continuent à accepter des rôles en Tunisie ?
Ça m’intéresse évidemment de travailler en Tunisie, au cinéma comme à la télé et ça me manque de jouer en notre dialecte. Je veux vraiment être présente sauf que les propositions que je reçois ne me conviennent pas. En lisant le scénario, je ne perçois pas d’apport spécifique que je pourrais offrir à ces rôles. Je reçois constamment des textes et j’attends un rôle qui me parle vraiment et où je pourrai m’épanouir pleinement.
Comment passez-vous votre temps libre quand vous n’êtes pas en tournage ?
Je faisais de la peinture depuis que j’étais toute petite. J’ai renoué avec cette passion récemment. Même si j’ai un peu perdu la main, je me rattrape. Je fais aussi beaucoup de sport. Je regarde beaucoup de films. Je lis en continu en hiver, mais le rythme de lecture se décline lors des vacances estivales. Je ne voyage pas beaucoup. La plupart de mes vols sont à destination de la Tunisie. C’est là où j’essaie de profiter au maximum de mes vacances. Je revois ma famille, mes amis et je fais le tour des endroits qui me manquent tellement chez nous. En Egypte, j’ai une passion particulière pour les plantes. J’en ramène tout le temps des nouvelles. J’aime beaucoup l’ambiance dans ma demeure en Egypte, accompagnée de mes chats et mes chiens. Ma vie est toute simple.
Quels conseils donneriez-vous aux actrices débutantes qui rêvent d’une carrière comme la vôtre ?
Je leur dirais surtout soyez vous-mêmes, soyez authentiques dans tout ce que vous faites dans votre métier et votre vie d’une manière générale. Chacune a sa personnalité et son style. Travaillez dur et faites des recherches pour vous former. Investissez-vous pleinement même quand vous n’êtes pas en tournage. Profitez des périodes de repos tant que vous avez l’énergie pour apprendre davantage. La meilleure phase dans notre métier, c’est sans doute celle de l’apprentissage, ce moment où l’on se découvre vraiment.